Mon fils tu seras aviateur ou pompier ou encore motard, pilote de course, conducteur de train....
Tu aimes les engins, les véhicules, les roues, les hélices, démarrer, rouler, planer, atterrir, voler dans le ciel, provoquer des accidents, des chutes, écraser des personnages en plastique qui protestent gentiment.
Tu tournes tout autour du canapé avec des camions qui font "beupbeupbeup... beup", qui klaxonnent et qui décollent en vrombissant.
Ils atterrissent les uns sur les autres dans l'allégresse tandis que tu fais résonner la sirène des pompiers.
Tes voitures parlent. Le débat est animé : "Laissez-moi passer, clament-t-elles de ta voix aiguë !"
Surprenant mon regard amusé posé sur toi, tu piques du nez, tu te tais d'un coup et tu me dis "non !" d'un ton presque suppliant.
Nul spectateur n'est admis pendant ta grande répétition de la vie.
Quelques minutes après tu viens m'interrompre dans ce que je faisais, tu saisis ma main avec force et tu m'ordonnes, ravi de tes bonnes idées : "Maman prend le rouleau compresseur ! An va rouler !"
Tu tournes tout autour du canapé avec des camions qui font "beupbeupbeup... beup", qui klaxonnent et qui décollent en vrombissant.
Ils atterrissent les uns sur les autres dans l'allégresse tandis que tu fais résonner la sirène des pompiers.
Tes voitures parlent. Le débat est animé : "Laissez-moi passer, clament-t-elles de ta voix aiguë !"
Surprenant mon regard amusé posé sur toi, tu piques du nez, tu te tais d'un coup et tu me dis "non !" d'un ton presque suppliant.
Nul spectateur n'est admis pendant ta grande répétition de la vie.
Quelques minutes après tu viens m'interrompre dans ce que je faisais, tu saisis ma main avec force et tu m'ordonnes, ravi de tes bonnes idées : "Maman prend le rouleau compresseur ! An va rouler !"
Lorsque tu conduiras, dans quelques années, un véritable engin supersonique, je devrai apprendre à ne pas m'inquiéter.
Je devine que les nuits où tu t'absenteras, les heures défileront à peine et mes paupières, écarquillées par la tension, ne cilleront pas pour protéger mes yeux de l'impression réitérée des deux point rouges du radio-réveil.
Je me ferai un devoir de penser Tout va bien se passer, il fait ça tellement bien.
B. me suppliera "Couche-toi mais couche-toi donc ! Ne t'inquiète pas comme ça !" mais je ne l'entendrai pas, occupée, pour ne pas entendre les chroniques de mon imagination morbide, à chantonner furieusement une de tes chansons préférées.
Avant le départ, je retiendrai les recommandations agaçantes dont j'aurais envie de t'abreuver. Je me mordrai les lèvres pour ne pas parler.
Pire, tolérante et compréhensive, il faudra sans doute que je t'encourage dans la voie que tu auras choisie. J'énumérerai tes victoires auprès de mes amis et connaissances auxquels je n'oserai confier mes peurs.
Au milieu de la nuit je parcourerai pour me rassurer, les coupures de presse qui parleront du dernier incendie que tu auras éteint ou de ton dernier record de vitesse. Je lisserai le papier collé dans l'album et je rabattrai doucement la feuille transparente qui le protégera du temps qui passe.
Les mots, agglutinés, formeront, dans mon esprit, une armure pour protéger le corps de mon enfant devenu grand.
Les heures à t'attendre me lamineront, au rythme fiévreux des tam-tam de mon coeur, mais je ne t'en dirai rien, je craindrais de t'agacer...
Je me souviens que jeune fille, lors de mes premières sorties, je prenais soin d'ouvrir la porte d'entrée silencieusement.
Je pénétrais sur la pointe des pieds dans l'appartement et alors que je reposais délicatement mes talons sur le sol en respirant à peine, la lumière s'allumait dans la chambre de ma mère.
L'interrupteur faisait "clac" et je soupirais pour de bon.
Je ne désirais qu'une chose, m'allonger, pour rêver à mon avenir, les yeux ouverts dans l'obscurité. Mais je devais, d'abord, aller présenter devant ma mère, mon visage dans la lumière.
J'avais peur qu'elle ne remarque les projets d'évasion que je ne formulais pas encore.
L'un de tes fantasmes m'effraie moins.
Si tu conduisais un camion poubelle, je serais soulagée. Je guetterais ton passage par la fenêtre et, vêtu d'un beau gilet que je t'aurais repassé le matin même, tu me ferais coucou. Le soir, tu aurais toujours quelque chose pour moi, un fauteuil cabossé, une boîte de conserve encore valable, une carte postale datant de la première guerre mondiale. Je te dirais :
"Je t'ai fait couler un bain mon chéri. Ensuite tu auras du gâteau aux épinards !"
Alors tu me prendras dans tes bras, et, me faisant tournoyer dans la pièce du t'écrieras de ta grosse voix :
"Ma petite maman pire tu es vraiment merveilleuse. Quand je serai grand, je t'épouserai !"
Photo : Jacques Henri Lartigue
20 commentaires:
Il a une chouette maman ton aviateur de camion-poubelle. J'ai le sourire à lire ton texte d'amour.
Ne t'inquiète pas pour tes angoisses, on viendra les lire sur ton blog...
Oh merci Nelly !
Tu crois que les blogs existeront encore dans 15 ans ?
rassures moi le gâteau aux épinards ce sera que pour le punir hein^^
très joli texte... où espoirs, imagination et questionnements se mêlent à la certitude de votre amour à tous deux...
j'ai beaucoup aimé !
nea,
Incroyable mais vrai, c'est un de ses plats préférés pour l'instant... Mais peut-être que dans quelques années il le détestera :)
indigo,
Merci beaucoup :)
"B. me suppliera "Couche-toi mais couche-toi donc ! Ne t'inquiète pas comme ça !" "
B. sera en fait plus inquiet que toi mais devra jouer au mâle solide !
N.B. : Très beau texte, mais bon, c'est pas la première fois.
Nicolas,
Au sujet de B. c'est exactement ce que j'imagine. Souvent, d'ailleurs,
c'est moi qui le rassure...
N.B. : c'est gentil ça, ça me donne la pêche autant que ça
Les mamans n'existent que pour s'inquiéter de leur petit, s'angoisser des dangers et s'émerveiller de leurs victoires.
Ton petit sera avionneur ou explorateur, qu'importe ! Si un gâteau aux épinards l'attend toujours à la maison.
Très très joli texte, mais c'est vrai qu'entre toi et balmeyer on est habitués désormais à la qualité.
Que serions nous sans nos mères ?
(En même temps, je fus fort soulagé d'apprendre que je ne pouvais pas épouser la mienne ...)
Dom,
Rhhhhhhhho tu exagères ! M'associer à Balmeyer !
Merci vraiment!
Boronali,
Mon fils, c'est pas pareil, tu comprends, il est très spécial, il ne quittera jamais sa maman...
Bon ça va ! je plaisante !
Zoridae,
Tu progresses en liens !
Un beau texte de maman pleine d'amour pour son gâté...
Je connais pas le gâteau aux épinards mais si je suis infirmière un jour tu voudras bien être ma maman pour me le faire gouter ? ;)
Et oui , le temps passe vite et mon gamin passionné de voitures .. de courses, celles qui vont vite , très vite.. Et je me dis ..Bon avec la lutte anti-pollution (ça , ça me rassure, je dis , qu'il ne pourra jamais aller si vite ) Avec bonne conscience, je me dis :génial la lutte contre le réchauffement climatique , ça vient à point!
mais j'ai tout bonnement zappé ton texte , trop lourd , surtout lorsque s'ajoute une defficience musculaire..
Nicolas,
C'est pas moi qui l'ai fait, j'ai essayé mais il voulait pas marcher...
Yelka,
Révise donc au lieu de lire des blogs ;)
mc,
Super, je n'avais pas ensé au réchauffement climatique.
Je suis désolée si mon billet t'a pesé sur le coeur. Reçois toute ma sympathie.
Les enfants grandissent, et c'est aussi cela qui est beau. Je me dis souvent que la plus grande consolation à la vieillesse consiste en l'accompagnement de l'enfant vers l'âge adulte, et après ; les enfants ne cessent jamais d'être les notres, non ?
Il y a du parfum dans ton texte, un certain bonheur inconscient de l'inquiétude (parce qu'il y a l'affirmation de la parenté là dedans)...
Veille quand même à l'Oedipe mal soigné ;-)))
Oh et puis on s'en fout de Freud, il écrivait moins bien que toi en tous cas...
Il y a toujours la lutte contre le réchauffement climatique , la preuve , c'est que je suis revenue te lire avec le sourire !
Dorham,
Merci pour les éloges et bienvenue.
Tu as raison bien sûr et je suis consciente de tout ce que tu écris (l'accompagnement, Freud et tout ça) mais parfois, juste dans l'imaginaire, j'ai envie de croire qu'il m'aimera toujours aussi fort que maintenant.
Mais je sais que ce ne serait pas sain, bien sûr...
La fin de ton commentaire m'a fait imaginer Freud écrivant de la fiction. Il en aurait été incapable, voyant dans chaque passion une maladie... J'ai divagué comme cela un bon moment...
mc,
J'en suis ravie :)
uhuhuh ;)
Rouge de honte... je n'avais pas cliqué sur le lien. Je sens bien l'angoisse d'une mère, c'est exactement ça. Même s'ils ne sont pas pilote.
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