vendredi 10 octobre 2008

Faire feu de tout bois

[Cette semaine j'ai joué ; je ne savais pas que je m'amuserais autant. Sous la direction d'une comédienne, metteur en scène et auteur de théâtre d'une générosité surprenante, Joëlle Rouland, avec des bibliothécaires, des éducateurs spécialisés, des puéricultrices, j'ai improvisé, chanté, ri, pleuré, bégayé, boité, tremblé... Et j'ai écrit.

A chaque fois nous disposions de quelques minutes et de consignes précises. Pas de magie, pas de sorcières, pas d'animaux parlant.

Pour le texte qui va suivre, la consigne était : "Ça commenc
e par "il était une fois"", il doit y avoir de l'amour, de la poésie, ça se termine bien."

Ensuite, Joëlle nous a attribué à chacun un héros : "un bol, un parapluie, une brosse à dents, un vélo, une porte, une chaussette, un pyjama. Nous avons disposé d'une dizaine de minutes : c'est donc sans prétention aucune.

Si vous êtes inspirés, n'hésitez pas !]

Il était une fois, une porte fermée à double tour. D'un côté et de l'autre, un homme et une femme qui ne se parlaient plus, vaquaient.

"Si la porte s'ouvrait, pensait la femme de temps en temps, je pourrais regarder dans la rue, par la fenêtre du salon. J'aimais bien regarder dans la rue, par la fenêtre, avant..."

Alors, elle allait coller son oreille gauche contre la porte et grattait le bois, un tout petit peu, du bout d'un ongle.

La porte, ravie, se trémoussait : elle adorait qu'on la gratte et c'est pour cela qu'elle restait fermée.

"Si la porte s'ouvrait, pensait parfois l'homme, je pourrais me faire un café, dans la cuisine. J'aimais bien boire du café, avant."

Alors il allait coller son oreille droite contre la porte et, du plat de la main, il caressait un panneau de la porte, tout doucement.

Celle-ci, enchantée, grinçait : elle adorait les caresses et c'est pour cela qu'elle restait fermée.

Soudain, la femme perçut le chuchotement des caresses de l'homme sur la porte. Elle cessa de gratter.

Au même moment, l'homme avait entendu le grattement de l'ongle de la femme sur la porte et il avait interrompu ses caresses.

Furieuse d'être délaissée, la porte sortit de ses gonds et se brisa sur le sol. L'homme et la femme s'embrassèrent au dessus des débris :

"Et si nous faisions un feu de cette porte ? proposa l'homme.
- Oh oui, s'écria la femme, un vrai feu de joie !"

Illustration : Wilmer Murillo The Messenger of Love is old and tired

28 commentaires:

Unknown a dit…

qu'est-ce que c'est bien les portes qui se brisent, comme les murs qui tombent.

Zoridae a dit…

Bienvenue Massilimanga,

Je suis d'accord avec vous :))

Nefisa a dit…

il est 00h06 heures grecque, (ce qui fait que je posterais ce commentaire fini ou pas à 23h26.

Il était une fois un parapluie qui n'avait que faire d'abriter les gens.
Il était né parapluie des mains malhabiles d'une petite tailleuse chinoise. Il ne l'avait pas cherché. S'il avait eu le choix, il aurait préféré faire parachute, ou cloche à fromage.

Mais non, il devait passerla moitié de l'année a surplomber les pellicules de son propriétaire et l'autre, en été, à prendre la poussière et sentir le rance dans un porte parapluie, en compagnie d'une canne à pommeau d'argent, d'une ombrelle oubliée là quelques siècles auparavant, et d'une balle de golf tout au fond qui la plupart du temps lui chatouillait la pointe.

Son maître était chauve sur le dessus, c'était déprimant à regarder. Mais un soir qu'il pleuvait, il l'abandonna aux mains d'une demoiselle qui sortait de chez lui (ne lui demandez pas, le parapluie , bien que parapluie malgré lui, avait une éthique : pas de commérage). La demoiselle avait des cheveux, si beaux si blonds, si fournis, qu'il en tomba follement amoureux.

Que faire ? Que dire ? Il en devint fou ! Toutes ses baleines s'étendirent se tendirent, s'en mirent presque à vombrir, et le parapluie explosa, paf, arrachant au pasage quelques mèches mordorées.
Poubelle le parapluie.

Mais oh quel bonheur, quel bonheur de finir fondu, recyclé avec les cheveux de sa bien aimée.

Zoridae: je déclare ce jeu, officiellement nul à chier.

Dorham a dit…

Nef, l'homme que j'aurais dû être est un chieur !!!

Moi, je veux bien relever le défi. Je suis donc une brosse à dents. No problemo, j'y réfléchis !

Zoridae a dit…

Nef,

Pourquoi tu dis ça ? Ton texte est drôle !
Par contre tu as triché pour la fin heureuse...

Non le jeun n'est pas nul, c'est peut-être de le faire sur un blog mais j'ai trouvé ça très chouette en vrai !

Dorham,

Pourquoi dis-tu que tu es un chieur ?

Ravie que tu t'y colles !

Dorham a dit…

Non, c'est Nef qui est un chieur et l'homme que j'aurais dû être...

Nefisa a dit…

Dorham la femme que j'aurais du être est-elle capable de pondre son habituel roman fleuve en moins de dix minutes ? allez 2 pages word?

pourquoi suis-je un chieur d'ailleurs ?

non zoridae c'est pas nul. mais de l'amour et de la poésie ? franchement ? je trouve ça où moi ?

Anonyme a dit…

Désolé, je dors déjà.

Dorham a dit…

Nef,

je ne sais pas moi-même... Je dis des trucs comme ça ! C'est Balmeyer qui me dit de les dire, sinon, il me bat...

Nefisa a dit…

Balmeyer t'a dis de dire que j'étais un chieur, alors que j'ai crée rien que pour lui un comité de soutien aux Balmeyers bafoués ?
l'ingrat.

Catherine a dit…

C'est surprenant, ces deux petites histoires. J'aime bien l'histoire de la porte qui finit au feu. J'ai toujours du mal à fermer les portes, c'était un sujet de discorde entre mon Luminaire et moi, au début. Maintenant, il laisse les portes ouvertes aussi...
Nef, je suis d'accord avec Zoridae, votre histoire est drôle mais finit mal.

Nefisa a dit…

c'est parce que vous ne croyez pas à la réincarnation.

Catherine a dit…

La réincarnation des parapluies ? mdr. Non, pas vraiment !

Didier Goux a dit…

On croirait Gabin et Signoret dans Le Chat, mais en plus gai.

Et j'aime aussi beaucoup le parapluie de Nef : je me suis marré comme une baleine...

Dorham a dit…

Mon Dieu, "Le Chat", quelle horreur ce film. Rien que d'y penser, ça me file des frissons partout...

Audine a dit…

J'aime beaucoup l'histoire de la porte : Zo, on devrait te donner plus souvent des consignes concernant les fins heureuses (enfin, on pourrait commencer par les fins un tantinet optimistes !).
Bon j'aime bien aussi l'histoire de Nef, mais c'est parce que l'idée d'un parapluie qui fond dans des cheveux longs m'amuse, bien fait pour les cheveux longs.

Balmeyer a dit…

"Balmeyer t'a dis de dire que j'étais un chieur, alors que j'ai crée rien que pour lui un comité de soutien aux Balmeyers bafoués ?
l'ingrat."

Nef ? Qu'est-ce que je viens faire là dedans, moi ?

Nefisa a dit…

je sais pas.Je dis des trucs comme ça, c'est Dorham qui me dit de les dire, sinon il me bat.

Marie-Georges a dit…

Au fil de ma lecture je m'identifie à la porte affectueuse et je pleure à la fin, c'est malin !

Zoridae a dit…

Dorham,

Il ne faut pas y réfléchir !!
Et il faut l'écrire en 10 minutes pas plus !

Nef,
"non zoridae c'est pas nul. mais de l'amour et de la poésie ? franchement ? je trouve ça où moi ?" : tu me fais rire !

Catherine,

Contente que ça vous plaise et à bas les portes !

Didier Goux,

J'ai vu ce film il y a bien longtemps mais c'est beaucoup plus noir que mon historiette...

Audine,

Toi aussi tu me fais rire !
Comment tu ne trouves pas ce que j'écris drôle et revigorant d'habitude ;) ?
(Et qu'as-tu contre les cheveux longs ?)

Marie-Georges,

Tu la vois affectueuse ? Moi comme une profiteuse... Ne pleure pas ! Elle a une belle fin !

Anonyme a dit…

Il était une fois une fois une chaussette. Oh, mais pas n’importe laquelle ! C’était une chaussette seule. Depuis quelques mois, sa moitié était introuvable.
Alors elle trônait sur la commode, guettant avec attention le retour de sa douce.
100 % bambou, confortable, noire avec un petit liseré gris, c’était la rolls de la chaussette. Avec son double, elle aimait se pavaner devant les 100 % Coton. Des chaussettes bas de gamme en somme.
Le propriétaire de cette paire en bambou l’aimait par-dessus tout. Lorsqu’il avait un rendez-vous important, il la choisissait toujours. Grâce au bambou, la transpiration excessive était absorbée.
Sauf que depuis le mois de mars, son double avait mystérieusement disparu. C’est le lot de nombreuses chaussettes. On les lave ensemble mais l’autre disparait. Mais où ? Dans la machine ? Sur l’étendoir ? C’est le mystère de la chaussette.
Sur cette commode, la chaussette prenait donc la poussière. Son noir de jais était passé à un noir mat. Le gris menaçait de pointer son nez. Quelle déchéance ! C’est vrai qu’une chaussette seule perd son utilité, à moins d’avoir un propriétaire unijambiste …
Et madame Bambou ne voulait surtout pas devenir un chiffon à poussière ! Elle deviendrait la risée de la tribu des chaussettes Coton !
Mais voici qu’en pleine crise existentielle, la chaussette Bambou aperçut derrière la commode son double !
Une contorsion à droite, une à gauche, la chaussette tomba derrière la commode. L’histoire ne nous dit pas ce qu’elles firent ensemble au moment de ces retrouvailles. Bien-sûr qu’elles étaient inutiles derrière cette commode, mais elles étaient enfin ensemble. Et qui sait, peut-être qu’un jour, le propriétaire bougerait la commode et retrouverait sa paire fétiche.

Zoridae a dit…

Leiloona,

Bienvenue ici et merci pour cette chouette histoire !
J'en veux d'autres !!!

Anonyme a dit…

Merci aussi d'avoir suggéré cet exercice ! :)

Catherine a dit…

J'espère que le propriétaire fera rapidemment le ménage et trouvera des bébés chaussettes en bambou...

Anonyme a dit…

n'oublie pas le pyjama !
Ai commandé ta nouvelle, suis impatiente de la lire. Je te dirai...

Zoridae a dit…

Catherine,

Vous êtes une indécrottable romantique !

Sophie,

Oh que je suis touchée de te lire !

Mais oui, il y avait le pyjama aussi : je le rajoute...

(Tu pourrais d'ailleurs laisser ton joli texte dans les commentaires... Pour la nouvelle, tu me raconteras ?)

Le_M_Poireau a dit…

Zoridae : je m'essaierai peut-être à l'exercice un de ces jours !
:-))

[J'aime bien penser les objets comme vivants aussi...].

Zoridae a dit…

Monsieur Poireau,

Au boulot !